Le ciel d’Haïti, orphelin de ses cerfs-volants

Autrefois, à l’approche de Pâques, des cerfs-volants coloraient le ciel d’Haïti. Mais aujourd’hui, ces danses aériennes se font rares. La crise et la peur ont cloué au sol ces messagers de la Semaine Sainte.

Credit Photo : This Life’s Illusions / Unsplash

Il y a encore quelques années, le ciel d’Haïti était coloré à l’approche de Pâques. Des cerfs-volants, fabriqués avec du papier coloré, des bouts de tiges de cocotier et de la ficelle, dansaient dans le vent au-dessus des quartiers populaires. Ils annonçaient joyeusement la Semaine Sainte. Aujourd’hui, ce spectacle manque cruellement. La crise et la peur ont pris leur place.

À Port-au-Prince, les rues résonnaient des rires des enfants. Ils couraient, une bobine de fil à la main, les yeux rivés sur leurs cerfs-volants qui flottaient dans le ciel. Le vent de carême souffle encore, mais les cerfs-volants, eux, ont presque disparu.

“C’était une tradition. On fabriquait nos cerfs-volants nous-mêmes, avec les moyens du bord. C’était notre façon de fêter Pâques. Maintenant, les enfants n’ont plus cet espace de liberté, et les familles ont d’autres priorités.” raconte Ronald, 42 ans, un ancien passionné du quartier de Carrefour-Feuilles.

La peur et les soucis ont tout changé. Les terrains de jeux d’hier sont devenus des zones de danger ou des abris improvisés pour des familles déplacées. Les familles, écrasées par la pauvreté, n’ont plus le temps ni l’argent pour ces petites joies. Faire voler un cerf-volant, c’était pourtant plus qu’un jeu. C’était un symbole de liberté, un moment où l’on pouvait rêver un peu, oublier les soucis.

Dans les écoles aussi, la tradition s’efface. Avant, on encourageait les enfants à fabriquer leurs propres cerfs-volants. Aujourd’hui, on ne parle que de sécurité, de rationnement et de survie. “Tout le monde est pris par les problèmes du quotidien. Maintenant, tout est centré sur comment tenir jusqu’au lendemain. Les activités culturelles totalement sont à l’arrêt.” explique un professeur de Port-au-Prince.

Pourtant, les cerfs-volants n’étaient pas qu’un simple jeu d’enfant. Ils symbolisaient aussi l’élévation, la liberté, la légèreté autant d’éléments spirituels et poétiques dans une société souvent alourdie par les drames. Leur disparition du ciel haïtien laisse un vide, comme si une partie des souvenirs d’Haïti s’envolait avec eux.

Ici et là, quelques irréductibles continuent de faire voler leurs créations là où le calme le permet encore. Ils résistent, fil tendu entre tradition et espoir. Un jour, peut-être, le ciel d’Haïti retrouvera ses couleurs et ses rires. Les cerfs-volants voleront à nouveau, comme un clin d’œil à l’âme d’un peuple qui n’abandonne pas.

FHM

61 Comments

  1. La disparition des cerfs-volants sur l’île d’Haïti me touche profondément. En lisant cet article, je me suis remémoré mes 10 ans, une période magique où je fabriquais et faisais voler mes propres cerfs-volants. C’était un moment de liberté et de créativité, où chaque vol était une célébration de l’enfance. La tradition des cerfs-volants est bien plus qu’un simple passe-temps ; elle représente un lien culturel et une joie partagée. J’espère que nous pourrons préserver cette belle tradition et redonner vie à ces magnifiques créations dans le ciel haïtien.

  2. C’est triste de faire ce constat mais malheureusement ce n’ est pas la dernière de nos traditions qui est en train de disparaitre. On colorait aux mille couleurs l’air du vent dans notre ciel, maintenant on laisse la place aux fumées de nos maisons😥.
    Merci FHM pour ce beau souvenir évoqué !

  3. Si nou pa leve pied nou , En 2035 pays a ap San tradition.
    Jan Paran nou konn ap di nou Sak t gen sou temps pa yo a ki disparaître Kounya c konsa nou pral di pitit nou li pa trop tard pou nou sove sa konsa rete yo ☺️

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