Mensonges et calculs farfelus : La recette trompeuse des tarifs de Trump

Bien avant son retour à la présidence, Donald Trump dénonçait de prétendues injustices commerciales dont les États-Unis seraient victimes. Parmi ses cibles favorites, les tarifs douaniers exorbitants que des pays comme la Chine, l’Union Européenne (UE) et l’Inde imposeraient aux produits américains. À cet effet, le président américain a procédé à une manipulation économique aux conséquences potentiellement lourdes.

Crédit photo : BRENDAN SMIALOWSKI / AFP

Selon la Maison Blanche, la Chine taxerait les exportations américaines à hauteur de 67 %, l’UE à 39 % et l’Inde à 52 %. Ces chiffres, martelés dans des discours et sur les réseaux sociaux, ont de quoi impressionner. Mais la réalité est bien différente : ces données sont largement exagérées, voire inventées, par rapport aux statistiques officielles. Derrière cette distorsion se cache une méthode de calcul douteuse et une stratégie politique claire.

Les tarifs douaniers moyens appliqués par les pays en question, tels que rapportés par l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) pour 2024, racontent une tout autre histoire. Prenons la Chine : alors que Trump évoque un taux de 67 %, l’OMC indique un tarif moyen appliqué de 4,9 % sur les biens non agricoles. Même en tenant compte de secteurs spécifiques où les taxes peuvent grimper (comme l’automobile ou l’agriculture), la moyenne reste à des années-lumière du chiffre avancé. Pour l’UE, contre 39 % selon Trump, le tarif moyen appliqué est de 1,7 %, avec des pics à 10 % sur les voitures ou 25 % sur certains poids lourds. Enfin, l’Inde, accusée de taxer à 52 %, applique en réalité un tarif moyen de 6,2 %, bien que certains produits puissent atteindre des taux plus élevés.

Ces écarts ne sont pas de simples erreurs d’arrondi. Ils découlent d’une manipulation délibérée des faits. Si l’administration Trump voulait pointer des cas spécifiques de tarifs élevés, elle aurait pu le faire avec précision – par exemple, les 25 % de l’UE sur les camions américains. Mais en gonflant les moyennes à des niveaux absurdes, elle choisit de présenter une image caricaturale du commerce mondial, où les États-Unis seraient systématiquement lésés.

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Alors, d’où viennent ces chiffres ? L’administration Trump n’utilise pas les données tarifaires réelles, mais une formule maison aussi simpliste que trompeuse : le « tarif réciproque ». Ce taux est calculé en prenant le déficit commercial des États-Unis avec un pays donné, en le divisant par la valeur des importations américaines depuis ce pays, puis en divisant le résultat par deux.

Prenons l’exemple de la Chine en 2024 : un déficit commercial de 295 milliards de dollars, des importations de 439 milliards, soit un ratio de 67 % (295 ÷ 439). Divisé par deux, cela donne environ 34 %, et c’est le tarif douanier imposé à la Chine.

Ce calcul n’a aucun lien avec les tarifs douaniers réels, qui sont des taxes appliquées aux importations et mesurées par des organismes comme l’OMC. C’est plutôt une vision comptable du commerce, où tout déficit est interprété comme une injustice à corriger. Les économistes ont largement critiqué cette approche, la qualifiant de « non-sens statistique ».

Si les chiffres sont faux, les intentions, elles, sont claires. En exagérant les tarifs étrangers, Trump justifie sa propre politique de représailles : imposer des taxes massives sur les importations aux États-Unis. Cette stratégie vise deux objectifs. D’abord, galvaniser sa base électorale en jouant sur le sentiment nationaliste et la peur de la concurrence étrangère. Ensuite, forcer les pays visés à négocier des concessions commerciales.

Mais cette politique a un coût. Les tarifs de Trump, s’ils sont appliqués, risquent d’augmenter les prix pour les consommateurs américains, de perturber les chaînes d’approvisionnement et de provoquer des représailles. Par exemple, la Chine, elle dispose d’un arsenal économique suffisant pour riposter sans plier. En effet, Pékin a retorqué en appliquant – à partir du 10 avril – des taxes douanières réciproques de 34 % sur les produits américains.

L’administration Trump ment sciemment sur les tarifs douaniers étrangers. En détournant les déficits commerciaux en pseudo-tarifs, elle travestit la réalité pour servir une narrative populiste. Si cette tactique peut marquer des points politiques à court terme, elle menace de plonger l’économie mondiale dans une spirale de protectionnisme dont personne ne sortira gagnant.

FHM

105 Comments

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